Une nouvelle journée de dur labeur venait de s'achever. Le moins que l'on puisse dire, c'est que comme les autres jours, cette journée n'avait pas été de tout repos. Tout avait commencé par un réveil à 5h du matin - théoriquement, il s'agit du milieu de la nuit pour un jeune de mon âge. Mais bon, ici, la grâce matinée était un rêve, rien de plus. La douche froide du matin avait été plutôt bénéfique , puisqu'elle avait servi à m'éclaircir brièvement les idées et Dieu sait que j'en avais bien besoin pour attaquer du bon pied cette journée qui comme les autres, s'annonçait bien longue ! Après un petit déjeuner éclair passé en compagnie des quelques personnes avec qui j'avais tissé quelques liens amicaux durant les jours déjà passés dans cette ferme, j'appris que le planning du jour m'avait assigné à passer la journée aux écuries. J'avais accueilli la nouvelle avec un léger soupir. Passer tout mon temps avec les chevaux, ce n'était pas vraiment ce que je préférais mais on dirait que j'allais devoir m'y faire, au moins pour aujourd'hui. Je me rendis donc à mon rythme aux écuries. En arrivant, je caressai rapidement l'encolure d'un cheval, avant de réfléchir aux diverses tâches qui m'attendait. Au programme du jour : nettoyer les boxes, nourrir les cheveux plusieurs fois dans la journée, et bien entendu, emmener ces derniers faire une promenade. En clair, le programme qui m'attendait était tout simplement GE- NI- AL. Je soupirai à nouveau. C'est dans ces moments là que je me disais que sans cet enchainement de circonstances, je ne serais peut être jamais arrivé ici, dans ce trou paumé où je vivais depuis déjà bien des semaines. Dans des moments comme ça, la solitude me pesait. L'éloignement avec ma mère se faisait ressentir et me rappelait que j'étais seul dans cette ville, dans cette galère. La journée passa lentement, mais elle passa finalement. Aucune blessure à signaler aujourd'hui, je m'en sortais pas si mal enfin de compte. Par contre, je sentais le canasson, et pas qu'un peu ! Une nouvelle douche s'imposait. Par chance, les douches communes étaient libres à ce moment là, ce qui me laissa le temps de profiter un peu de l'eau et de m'évader loin d'ici pendant au moins quelques instants. Puis, après m'être vêtu d'un léger débardeur blanc et d'un short, je retournais dans ma chambre pour me saisir d'un livre, avant de me rendre dans un lieu où je savais que je serai totalement tranquille pour m'adonner à ma lecture, mon passe temps favori.

Après avoir monté quelques marches, j'arrivais enfin à l'endroit voulu : le grenier. Par chance, ce dernier est totalement vide. Personne à droite, personne à gauche, je suis bel et bien seul. Pour être franc, la solitude ne me gêne en rien, bien au contraire. Après avoir observé pendant un petit moment la pièce, je me décide enfin à m'asseoir sur une botte de foin et sors dans le même temps le livre que j'ai apporté : Jules César de William Shakespeare. Rien de mieux qu'un bon livre pour combler la solitude et faire passer un peu le temps. Il en faut peut pour être heureux finalement.

Lennon & Ellie

" Lilie dépêche toi ou l'autre imbécile de fermière va encore hurler ! " La jeune fille en questionne soupire bruyamment. Il est à peine six heures du matin, soit encore la nuit, qu'on lui prend déjà la tête. Ce matin elle a pas envie. Non vraiment, elle est pas d'humeur à faire des efforts. Pourquoi ? Parce qu'elle est réveillé depuis quinze minutes et déjà sa journée est un enfer. Premièrement impossible de remettre la main sur son tee-shirt favori. Elle l'avait lavé, à la main, hier spécialement pour pouvoir le mettre aujourd'hui et quand elle c'est levé il n'était plus sur le fil à linge. Deuxièmement, elle a pris une douche froide. Bah oui, pendant qu'elle fouillait son sac dix fois, qu'elle faisait le tour du ranch pour son tee-shirt, le reste des saisonniers avaient eu le temps de passer sous la douche. Une douche chaude. Elle était exaspérée. Et maintenant voici que son frère lui hurlait après pour qu'elle s'habille en vitesse. Le petit déjeuner allait être servis d'une minute à l'autre. Tant pis. Elle mangera plus tard. Elle en a déjà marre de courir. " T'occupes pas de moi tu veux ! " Quand elle est de mauvaise humeur, elle est méchante avec tout le monde. Sans exception. Même Lucas a le droit au pire insulte. Quand elle est de mauvaise humeur, la meilleure chose à faire est de la laisser tranquille. Ne lui parlez surtout pas quand elle est dans cet état là. C'est une question de survie. Elle souffle. Cette journée s'annonce mauvaise vraiment mauvaise.
Elle arrive dans la cuisine alors que tout le monde sort prendre sa tache. La fermière en chef lui lance un regard noir. Elle lui fait un sourire d'hypocrite. Elle attrape un tasse de thé, que son frère avait du lui mettre de coté et elle l'avale en une gorgée. " Ellie, tu es au champ aujourd'hui. Il y a les légumes à cueillir ". Zen, restons zen. Ellie sert le poing. Il ne manquait plus que ça. La cueillette ! Au secours ! Les écuries lui convenaient tout à fait. Elle soupire, encore une fois. Et la fermière semble satisfaite. Ellie aurait pu la tuer, là maintenant dans cette cuisine tellement elle était énervée. Elle claque la porte en sortant et elle allume une cigarette. Il n'y a que ça qui pourra la calmer et encore ce n'est même pas sûr. Elle se dirige vers le champ, tout en tirant plusieurs lattes à suivre. La journée va être longue !

Ellie respire. Elle vient de terminer sa journée. Enfin. Elle n'avait jamais trouver une journée aussi longue qu'aujourd'hui. Elle était toute seule au champ. Elle n'a parlé à personne depuis le matin. Une véritable torture pour elle. Mais histoire d'en rajouter une coucher, la propriétaire du ranch lui a gentillement demandé d'aller aidé une fille à changer le foin des vaches. Pourquoi le sort s'acharne-t-il sur elle, aujourd'hui ? Elle n'attend qu'une chose, pouvoir s'allonger sur son lit et fermer les yeux cette nuit. Non mais vraiment, elle n'en peut plus. Alors tout en montant au grenier elle rouspète. Et puis merde alors, elle a qu'à se débrouiller l'autre saisonnière. Elle veut juste faire une pause. Elle veut juste se détendre. Elle se jette dans une botte de foin et elle s'allonge dedans, en étoile. Elle avait oublier le bonheur d'être allongée et d'être seule. Dans le silence. Elle tire une cigarette de sa salopette et elle l'allume. Elle est paisiblement allongée lorsqu'elle entend un bruit. Quelqu'un monte au grenier. Elle se cache derrière la botte de foin, au cas où cela serait la propriétaire. Mais elle aperçoit Lennon et un sourire nait sur son visage. Le premier de la journée. Il s'assoit au pied de la botte de foin et Ellie retourne s'allonger dessus. Il ne l'a pas encore vu. Et elle, elle sourit. Il sort un livre. Elle se pèche au dessus de son épaule et elle lui murmure " Tu lis quoi ? " avant de se reculer et de tirer une latte sur son bâton de tabac.

Plongé avec le plus d'attention possible dans l'œuvre de Shakespeare, je ne faisais plus vraiment attention au monde qui m'entourait. J'étais déconnecté du monde. À ce moment là, j'étais dans mon propre monde à moi, dans ma bulle où moi seul avait la capacité d'entrer. Lire me détendait et me reposait en même temps. Tout le poids de cette journée longue et éreintante disparaissait au fur à mesure que j'avançais dans ma lecture. Certain se détendait en écoutant de la musique ou encore en faisant une sieste, pour ma part, un bouquin me suffisait amplement. Chacun son truc après tout. Vu que mon attention était entièrement détourné par ce livre, je ne percevais aucun des bruits de la pièce tant j'étais concentré. Le plafond aurait bien pu s'écrouler, un incendie se déclencher, je n'y aurais peut être même pas fait attention. C'est pourquoi, entendre une douce voix à proximité de mon oreille, eut comme effet de me faire sursauter. En prime, le livre que je tenais en main tomba sur le sol, à proximité de la botte de foin qui me servait à ce moment là de dossier. Curieux, je me tournai pour découvrir l'identité de mon visiteur, celui qui avait manqué de faire un arrêt cardiaque !
Accoudée à la botte de foin, un léger sourire au coin des lèvres, c'est bien Ellie qui se trouvait derrière moi. En la voyant, un rapide sourire passa sur mes lèvres. Voilà quelques temps que nos chemins ne s'étaient pas croisés à la ferme. Pour la résumer, ma relation avec Ellie était des plus complexe : c'était un jeu perpétuel du chat et de la souris qui ne semblait pas avoir de fin. Après quelques jours d'ignorance mutuelle, j'avais fait le premier pas vers elle en lui mentionnant mon prénom. C'était parti ! Je crois que c'est comme ça que ça a vraiment commencé. Depuis, on se cherchait, on se taquinait et on se tournait mutuellement autour. Ce jeu semblait sans fin. Enfin, du moins jusqu'à ce que l'un de nous deux cède en premier, mais cela ne semblait pas encore au programme. Jouer était tellement plus simple que d'essayer de comprendre ce qui nous arrivait ! Une cigarette dans sa bouche, la fumée m'arriva en pleine figure, ce qui me fit légèrement grimacer : la cigarette, ce n'était pas vraiment mon truc. Passé l'effet de surprise de sa présence, je pouvais maintenant réponde à sa question. Je ramassai donc mon livre et le posai sur la botte de foin, bien en évidence pour qu'elle puisse y lire le titre de l'oeuvre. "Jules César, de William Shakespeare" dis- je en même temps qu'elle observait la couverture. Posant mon coude sur la botte de foin où elle se trouvait, je la regardai un court instant avant d'afficher un sourire malicieux sur ses lèvres. " Et toi ? Tu glandes... pour pas changer ?" lui lançais- je par pure et simple provocation pour la taquiner. C'était reparti ! C'était comme ça entre nous. Du sarcasme, de la provocation, des blagues ou encore de l'ironie, chacun des protagonistes avaient ses propres armes pour taquiner l'autre. Le jeu était lancé et les règles n'avaient pas changées.

Lennon & Ellie

En voyant Lennon débarquer dans le grenier, elle avait sourit. Voir une personne avec qui elle s'entendait bien, c'était ce qu'il lui fallait. Surtout après une journée comme celle qu'elle venait de passer. En lui demandant ce qu'il lisait, elle le fit sursauter. Ce qui eut pour effet de la faire sourire un peu plus. Il était plongé dans son monde à lui et elle l'avait dérangé. Il se retourne vers elle, un sourire aux lèvres. "Jules César, de William Shakespeare" fit-il tout en déposant son livre sur la botte de foin. La jeune fille examine la couverture et hausse les épaules. Elle a lu du Shakespeare mais elle n'a jamais entendu parler de se livre. Elle l'attrape et lit le dos de la couverture. Elle secoue la tête puis le repose. Pourquoi pas. Mais pendant les vacances, elle préfère lire des trucs simple, sans prise de tête. Pas que Shakespeare soit gonflant mais les grands auteurs elle les gardes pour chez elle, entre deux cours. " Et toi ? Tu glandes... pour pas changer ?" dit-il avec un sourire malicieux collé sur le visage. Et le jeu est lancé.
Entre eux, il ne s'agit que de cela. De jeu. Ils se sont rencontrés alors qu'ils travaillaient ensemble à l'étable. Ils se sont ignorés pendant de nombreuses journées et puis Lennon est venu se présenter. Il l'a taquiné et c'était partit. Depuis les deux amis passent beaucoup de temps ensemble, enfin le plus possible. Parce qu'avec les corvées qu'ils ont à faire c'est vraiment pas évidement. Mais ils trouvent toujours du temps à s'accorder mutuellement. Ce qu'ils font quand ils sont ensemble ? C'est simple ils se cherchent. Lennon lance une vanne à Ellie. Elle lui répond. Lilie taquine le jeune homme. Il riposte. Il la charme. Elle le séduit. Un jeu du chat et de la souris. Mais elle adore cela. Ça la fait rire. Elle passe des bons moment en sa compagnie. C'est le principale. Elle ne veut pas chercher plus loin. Non, parce qu'elle a peur de ce qu'elle pourrait trouver. Les sentiments et elle, ça n'a jamais fait bon ménage alors elle préfère ne pas y penser. Jouer, c'est mieux. Ça fait moins mal et c'est plus rigolo. Et aujourd'hui Lennon, semble d'humeur à jouer. Tant mieux. Elle le regarde dans les yeux, avec un grand sourire. " Tu te trompes, encore, comme c'est habituel ! Je t'attendais voyons. Qu'est ce que je pourrais bien faire là sinon. " Fit-elle en lui tirant la langue. Puis elle attrape une grosse poignée de paille qu'elle glisse sous son tee-shirt. Et elle rit à gorge déployé. C'est enfantin mais elle adore ça. Elle le regarde avec un air de défi. Alors, il va se laisser faire ou va-t-il riposter ?

Avec un sourire aux lèvres, je la regarde observer d'un air dédaigneux mon livre. Dans mes souvenirs, je ne l'ai jamais vu un livre en main. Tout le monde n'aime pas forcément lire, c'est sûr. Tout le monde ne souhaite pas devenir écrivain, comme moi. Après avoir lu la couverture du dos du livre, elle repose ce dernier sur la botte de foin en hochant la tête négativement. Cela confirme mes pensées : lire du William Shakespeare ne semble pas vraiment être son truc et d'un côté, je peux comprendre cela. Après l'avoir provoqué avec ma réplique pleine de sarcasme, j'attendais maintenant une répartie de sa part. La connaissant, je savais pertinemment que cela ne saurait tarder. Le jeu était lancé et qui sait jusqu'où il irait ? Ça, personne ne le savait. Un jeu de crétin ? Peut- être bien, mais c'était notre jeu ! Pourtant, l'ambiance n'avait pas toujours été si détendu et légère entre nous. Si mes souvenirs sont bons, le soir de mon arrivé à la ferme, l'ambiance avait même été plutôt glaciale. Et encore, le mot est faible ! Froide, sèche, voilà la première impression que j'avais eu d'elle et ce n'est pas forcément le moment que je garderais le plus en mémoire. Pendant les premiers jours, les moments passés ensemble n'avaient pas été très gai. C'est dans le silence et dans l'ignorance qu'ils s'étaient déroulés. Et puis un jour, tout avait changé. Après lui avoir simplement soufflé mon prénom, c'est là qu'elle avait commencé à se dévoiler, à sa révéler, et c'est aussi là que notre jeu avait débuté. Je l'avais complimentée, elle m'avait répondu du tac au tac. Les journées avaient passé et des répliques de ce genre étaient devenues notre quotidien. " Tu te trompes, encore, comme c'est habituel ! Je t'attendais voyons. Qu'est ce que je pourrais bien faire là sinon.
Je ne pus retenir un léger sourire sur mes lèvres. Avant que je puisse réponde quelques chose, je la vois prendre une poignée de paille qu'elle glisse sans aucune hésitation sous mon tee shirt avant de me tirer la langue. Elle est espiègle. Derrière ce sourire d'ange, peut se cacher un vrai démon ! Alors que je me secoue pour faire glisser la paille, je l'entends rire encore et encore. Je me surprends même à la regarder avec un nouveau sourire alors qu'elle rit encore et toujours. Ainsi, elle semble heureuse et puis, encore plus jolie qu'à son habitude bien entendu. Trêve de laissé aller, que je riposte, c'est ça qu'elle attend et je le sais pertinemment ! Et ma réponse ne se fait pas attendre. Toujours accoudée à sa botte de paille, je la saisis par le poignet et l'entraîne avec moi. Probablement surprise, je la renverse et l'entraîne à même le sol jusqu'à me retrouver au dessus d'elle. Souriant, je me saisis à mon tour d'une poignée de paille et lui étale sans aucune retenue sur le visage. "Tu m'attendais, vraiment ? Les rumeurs disent que tu faisais semblant !" répondis- je sans cesser de lui sourire. Avec ma main, je retire quelques brindilles de son visage avant de la regarder à nouveau. "Même couverte de brindilles, tu restes pas trop moche, Ellie jolie" lui dis- je pour relancer le jeu. Je savais que sa répartie ne saurait tarder, j'étais habitué maintenant. Entre nous, la vengeance n'était pas un plat qui se mange froid. Bien au contraire.